Visite d’Obama à Hiroshima : Et si on donnait le Prix Nobel de la Paix aux survivants d’Hiroshima et de Nagasaki du monde entier ?

Le 22 mars 2016, j’annonçais la création de I’Alliance pour l’action d’urgence (NEAA). Le jour même, nous avons assisté à Bruxelles à une attaque terroriste tragique. Les gens ont commencé à envisager la réalité de la menace croissante d’une attaque terroriste contre l’un des 430 réacteurs nucléaires installés dans 31 pays.

L’accident de Fukushima accident m’a appris qu’un accident frappant une centrale nucléaire peut avoir des conséquences inimaginables pour la vie humaine pendant des siècles. Cet accident a provoqué pour ceux dont la vie a été bouleversée des dommages indicibles. Si la situation avait encore empiré, nous ne savons pas comment nous aurions pu calculer le coût de 24 000 années de dégâts environnementaux pour les générations futures. J’ai découvert avec Fukushima quelque chose d’essentiel : nous n’avions pas compris que l’irradiation causée par les bombes atomiques et celle qui résulte d’un accident nucléaire n’ont guère de différence en termes de risque pour la vie humaine.

La bombe atomique et la nécessité économique des centrales nucléaires suscitent deux manières de penser très différentes. Le Japon bien sûr est un pays qui a expérimenté le côté négatif des deux technologies. Quand le Président Obama s’est rendu à Hiroshima, il a dessiné « un avenir où Hiroshima et Nagasaki sont connus non pas comme l’aube de la guerre nucléaire, mais comme le début de notre prise de conscience morale. »

Je pense que ce message a été apprécié par les hibakusha, les jeunes générations de notre monde et la population du Japon.… Continue reading

Introduction de l’Alliance pour l’action en cas d’urgence nucléaire : Premières étapes après une catastrophe nucléaire

Akio Matsumura

À l’occasion du 5è anniversaire de l’accident nucléaire de Fukushima, j’ai écrit un article intitulé « Les leçons de Fukushima : nouvelles inquiétudes pour l’avenir. » J’ai eu le grand plaisir de recevoir beaucoup de réactions positives d’amis et d’autres lecteurs.

Nombre de lecteurs ont aussi exprimé leur frustration devant le fait que beaucoup de problèmes non résolus se poursuivent : 400 tonnes d’eau contaminée de la centrale de Fukushima se déversent dans l’océan chaque jour ; aucun site de stockage n’a encore été désigné pour les déchets nucléaires ; et aucune solution scientifique concernant le démantèlement des réacteurs fondus n’est en vue pour les 40 prochaines années. Les lecteurs ont également bien compris mon inquiétude quant à la forte probabilité d’attaques terroristes contre les centrales nucléaires en fonctionnement dans le monde et la nécessité d’établir des mécanismes et des stratégies pour faire face à la situation qui résulterait de ce genre d’attaque : plans d’action et interventions post-évènement. Je suis reconnaissant aux organisations Physicians for Social Responsibility/International Physicians for the Prevention of Nuclear War (PSR/IPPNW Suisse) d’avoir publié mon article en anglais et en français. (l’IPPNW a reçu le Prix Nobel de la Paix en 1985).

Nous avons compris qu’un simple incident ou une seule erreur dans n’importe laquelle des centaines de centrales nucléaires existantes pourrait causer des pertes humaines et des dégâts environnementaux terribles pendant plusieurs décennies, voire plusieurs siècles. Les dégâts provoqués par une attaque nucléaire ou une “bombe sale” seraient si énormes qu’il serait difficile de les calculer, mais il ne fait aucun doute que leurs coûts dépasseraient largement ceux du développement  et de la mise en œuvre de sources d’énergie renouvelables.… Continue reading

Les leçons de Fukushima : de nouvelles inquiétudes pour l’avenir

Akio Matsumura

Cette semaine le monde entier commémore le 5è anniversaire de la catastrophe qui a frappé la centrale japonaise de Fukushima Daiichi le 11 mars 2011, le pire accident nucléaire de l’histoire.

De multiples aspects de la crise continuent à affecter la santé de la population et la sécurité environnementale. Au total, 178 000 réfugiés (dont 99 750 à Fukushima) ne savent toujours pas quand ils pourront rentrer chez eux. Chaque jour, 400 tonnes d’eau contaminée s’écoulent dans l’océan. Des pluies torrentielles balaient les matériaux radioactifs encore présents sur le site pour les déverser dans la mer. 814 782 tonnes d’eau contaminées sont stockées dans plus d’un millier de citernes et chaque mois, de nouvelles citernes sont mises en place. Les 7 000 travailleurs de la centrale accomplissent chaque jour des taches dangereuses. Ces ouvriers qui prennent leur travail à cœur ont résolu jusqu’ici bon nombre de problèmes, mais certains problèmes continuent à mettre en difficulté les responsables et les équipes de nettoyage. Nul ne peut s’approcher des réacteurs 1, 2 et 3 en raison de l’intensité des radiations et il n’y a pas de solution scientifique à attendre pendant au moins 40 ans. Malheureusement, on ne peut pas exclure de nouvelles perturbations à venir : la probabilité d’un nouveau séisme important n’est pas nulle.

Depuis l’accident de Fukushima, nous avons eu la chance de recevoir rapidement des opinions et des recommandations de divers horizons. Physiciens nucléaires, médecins, militaires, sismologues, biologistes, océanographes, vulcanologues, journalistes, chefs spirituels, parlementaires, étudiants, organisations de citoyens et leaders d’opinion ont tous exprimé leur point de vue.… Continue reading

Un poison qui dure vingt mille ans : la sûreté nucléaire et notre long avenir

12 mai 2011

Akio Matsumura

Cela fait 25 ans que le pire accident nucléaire de l’histoire a détruitla centrale de Tchernobyl, en Ukraine, et nous ne connaissons toujours pas exactement l’ampleur des dégâts sanitaires qu’on doit en attendre. Il faut absolument mettre en place un programme de recherche sérieux, qui permette à la fois d’améliorer nos capacités à réagir à un autre terrible accident et de compléter notre compréhension des effets à long-terme des faibles doses de radiation. (New York Times Editorial, May 9)

L’explosion de Tchernobyl et l’incendie qui s’en est suivi ont propagé des radionucléides dans tout l’ouest de l’Union soviétique et partout en Europe. La catastrophe a relâché plus de quatre cent fois la dose de matériaux radioactifs provenant de la bombe d’Hiroshima. Mon vieil ami Evgeny Velikhov, l’un des plus grands scientifiques soviétiques, supervisait la délégation responsable de l’enquête et du nettoyage post-catastrophe.

Au Forum mondial d’Oxford en 1988, Velikhov a parlé de cette enquête qu’il a menée personnellement et a bien fait comprendre aux participants l’ampleur de la catastrophe. Durant la même conférence, un scientifique américain bien connu, Carl Sagan, a exhorté les États-Unis et l’Union soviétique à réduire leur arsenal d’armes nucléaires. Carl a été plus loin, allant jusqu’à demander aux participants indiens et pakistanais pourquoi leur pays produisaient des armes nucléaires en secret. Les diplomates indiens et pakistanais ont tous deux nié que les pays aient un programme nucléaire et s’en sont tenus à la version officielle : leur pays construisait des centrales nucléaires destinées à la production pacifique d’énergie.… Continue reading

Le prix Nobel tunisien : Le dialogue comme vertu politique

La crise des réfugiés va sans aucun doute redéfinir les politiques économiques, culturelles et géopolitiques globales et mettre à l’épreuve les principes qui sont au cœur de l’Union européenne. La crise syrienne va non seulement continuer à peser sur la crise des réfugiés, mais aussi déclencher potentiellement une révolution en Syrie et dans d’autres pays du Moyen-Orient. Nous aimerions partager ici une mosaïque de points de vue sur ces questions compliquées. La France a des liens historiques avec la Syrie, l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient. En général, les Français ont une bonne connaissance des problèmes de ces régions. 

J’ai eu la chance que l’on me présente à Patrice Barrat, fondateur de Bridge Initiative International, par mes bons amis Byron Janis et Maria Janis Cooper, son épouse et également la fille de l’acteur Gary Cooper.​

Patrice travaille depuis de nombreuses années sur le terrain sur son idée d’établir des passerelles destinées à transcender les barrières traditionnelles de la culture et de l’idéologie. Récemment, il a beaucoup séjourné en Tunisie pour poursuivre sa mission à la source du Printemps Arabe et a pu être témoin des activités du Quartet, lauréat du Prix Nobel de la Paix cette année. Je suis très heureux d’introduire son noble travail. 

Byron Janis, pianiste de concert à la célébrité internationale, a composé la chanson du Forum Global ” Un Seul Monde”- avec des paroles de Sammy Cahn (qui a reçu quatre Oscars) ; la chanson fut chantée par John Denver.

— Akio Matsumura

Le prix Nobel tunisien

Le dialogue comme vertu politique

Cela avait l’air si simple.… Continue reading

Réfugiés et responsabilité

Akio Matsumura

Dans son discours d’ouverture de l’Assemblée générale des Nations Unies, le secrétaire général Ban Ki-moon a attiré l’attention sur la souffrance des refugiés qui fuient la Syrie ; il a insisté sur les défis politiques et humanitaires et les responsabilités que représentent pour les dirigeants et les citoyens européens le nombre toujours grandissant de personnes en quête d’un refuge. Plus de 4 millions ont fui la Syrie depuis 2011 et ce nombre ne cesse d’augmenter, car il faut y ajouter les réfugiés d’Iraq, d’Afghanistan et d’autres pays où il est devenu moins dangereux de fuir que de rester.

L’Europe du Sud et de l’Est – la Grèce, l’Italie, la Hongrie, l’Albanie, la Macédoine, le Monténégro, l’Autriche, la Slovaquie, La République tchèque, la Bulgarie, La Roumanie, la Turquie, la Pologne et l’Allemagne – les pays qui portent la plus grande part du fardeau des arrivées de migrants, ont été eux aussi confrontés aux conflits, aux révolutions ou à des changements dramatiques.

Un article de septembre du New York Times demande à l’Europe de l’Est de ne pas oublier son propre passé :

Alors même que se déroule la pire crise de réfugiés depuis la Seconde guerre mondiale et que le flot de réfugiés ne cesse de grossir, poussant l’Allemagne et d’autres nations à fermer provisoirement leurs frontières, les ministres de l’Intérieur européens n’ont pas réussi lundi à se mettre d’accord sur ne serait-ce qu’une répartition systématique limitée des réfugiés pour permettre leur réinstallation dans les pays membres.

Cette réaction tragique est d’autant plus inadmissible que ceux qui se sont opposés le plus violemment aux quotas faisaient partie de ces pays d’Europe de l’Est qui ont récemment savouré et largement profité d’avoir pu rejoindre leurs voisins occidentaux.
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Comprendre le défi nucléaire et trois autres menaces sécuritaires

Akio Matsumura

Les règles de la guerre sont en train de changer. Infiltrations secrètes de la cyberguerre. Conquête de vastes territoires et ressources par l’État islamique. L’ONU et les autres instances politiques que nous avons mises en place au 20è siècle n’étaient pas destinées à gérer de tels problèmes et ne parviendront sans doute pas à le faire. Les réformes qui ont été régulièrement appliquées n’ont pas réussi à suivre le rythme des changements nécessités par la technologie et l’insatisfaction de la jeunesse. Ces nouveaux problèmes exigent effectivement d’être envisagés différemment. Il y a un décalage entre les conséquences potentielles des problèmes de sécurité auxquels nous sommes aujourd’hui confrontés et les structures dont nous disposons pour y répondre.

Quatre problèmes plus graves que les autres menacent le monde. Chacun d’entre eux est un défi au cadre sécuritaire sur lequel nous nous reposons depuis 25 ans et menace de dégénérer en une catastrophe que nous ne pourrons pas juguler.

  1. Moyen-Orient : Cette région du monde est dans une situation terrible : guerre civile en Syrie, intensification de la guerre contre l’État islamique en Syrie, en Iraq, au Yémen, conflits entre sunnites et chiites dans la région et négociations nucléaires avec l’Iran.
  2. Pakistan : À quelques pas de là, le Pakistan possède des armes nucléaires, accumule les conflits tribaux et entretient avec l’Inde une rivalité exacerbée par un terrorisme soutenu par l’État.
  3. Est de l’Ukraine : la lente avancée du Président Poutine à la frontière se révèle de plus en plus dangereuse.
  4. Chine : L’énorme investissement consacré à l’immobilier a créé une bulle qui ne demande qu’à éclater.
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Un nouveau type de confrontation – 25è anniversaire du Forum Mondial de Moscou

Les violents attentats qui ont fait dix-sept victimes la semaine dernière à Paris et poussé des millions de personnes à descendre dans la rue dans un esprit d’unité reflètent le nouveau type de confrontation qui bouleverse les vies, la politique et les systèmes économiques. De profondes différences en matière de religion, de culture et de style de vie font que beaucoup considèrent que leur vie est en conflit avec celle des autres et que tout le monde s’appuie de façon d’autant plus stricte sur l’idéologie. La peur, le pessimisme et le manque de confiance en l’autre sont la marque des relations humaines au jour le jour dans une grande partie du monde et imprègnent également notre politique internationale.

Au départ, il y a 25 ans, le Forum Mondial des Chefs spirituels et parlementaires organisé à Moscou, symbolisait le commencement d’une ère nouvelle d’ouverture et d’optimisme, en même temps qu’il mettait un terme à une sombre période de méfiance et de désaccords. Le Mur de Berlin était tombé deux mois plus tôt et l’Union soviétique et les États-Unis cherchaient un moyen de coopérer après la Guerre froide. Le Président Gorbatchev, fer de lance de l’ouverture de l’Union soviétique, accepta d’accueillir plus d’un millier de personnalités religieuses et politiques au Kremlin pour plusieurs jours de dialogue sur les questions globales les plus pressantes à l’époque. Contrairement à ce qui se passe aujourd’hui, les leaders étaient à la recherche de nouvelles manières de faire avancer les choses, choisissant la conversation pour progresser, plutôt que de fermer les voies du dialogue.… Continue reading

Le problème de l’eau radioactive au Japon

Voilà maintenant près de quatre ans que sur ce site nous avons détourné notre attention des questions de sécurité internationale vers les problèmes inédits qui touchaient les réacteurs de Fukushima Daiichi. Il ne nous était pas possible en effet d’ignorer les risques potentiels d’un accident encore plus grave. Nous avons couvert la fusion des cœurs, les inimaginables conséquences d’un accident qui affecterait la piscine de refroidissement du réacteur n°4, les murs de glace et les risques de radiation pour les humains, la vie sauvage et l’environnement.

Notre contribution peut-être la plus importante a été de mettre en relation des physiciens, des biologistes, des décideurs, des experts nucléaires (et d’autres experts nucléaires), des médecins, des journalistesdes responsables de l’ONU, des chefs spirituels, des enseignants et des étudiants pour les aider à mieux comprendre les liens entre l’énergie nucléaire et les personnes et l’environnement concernés. Dans le domaine de l’ingénierie et de la science, mais aussi en politique et en économie, nous en sommes souvent réduits à adopter des styles de pensée verticaux. Notre mission est de connecter les divers domaines d’activités – et les individus qui sont aux commandes, à un niveau horizontal. Le débat sur les conséquences du 11 mars 2011 continuera pendant des décennies et ne sera pas nécessairement résolu. Nous espérons avoir pu élargir les échanges et les discussions. Dorénavant, Finding the Missing Link revient à ses préoccupations initiales et s’intéressera aux questions de sécurité, de religion et de politique dans le monde, en s’appuyant sur les leçons que nous avons tirées de notre travail sur Fukushima, dans l’espoir de bâtir des liens n’existant nulle part ailleurs.… Continue reading

Comment Harvard peut-il inculquer le discernement à nos dirigeants?

Akio Matsumura

Pour beaucoup, la chaleur du mois d’août est synonyme de vacances. Ceci est vrai aussi bien pour le Président Obama que pour le petit entrepreneur ou l’enseignant. Et pour les élèves et les étudiants, les parents et les professeurs, c’est aussi la dernière pause avant de se lancer dans la prochaine année scolaire.

Au cours des conférences du Global Forum à Oxford, Moscou Kyoto, Rio de Janeiro, Konya, et Jérusalem, j’ai eu le privilège de travailler avec nombre d’étudiants extraordinaires. La fraîcheur de leurs idées et leur dynamisme ont permis d’avancer plus loin à chaque rencontre. En 2007, j’ai eu la chance d’être présenté à Chris Cote, qui était alors en deuxième année à la Tufts University. C’est lui qui depuis gère notre site et travaille au développement de notre stratégie, et sa contribution est devenue indispensable. Le mois prochain, il va débuter ses études à l’École de Gouvernement Kennedy de l’Université d’Harvard. Parmi ses pairs, beaucoup seront originaires d’autres pays, envoyés par leur gouvernement pour bénéficier d’une éducation d’élite et leur pays comptera sur eux pour le guider dans les difficultés d’un avenir toutefois empreint d’espoir.

Par-delà le curriculum universitaire, les dirigeants à venir profitent aussi de l’idéalisme engendré par le groupe classe. Les amitiés nouées pendant les études – seule l’appartenance à un même groupe peut engendrer cette forme de confiance – seront un avantage extrêmement précieux sur lequel ils pourront s’appuyer tout au long de leur carrière : ce sont ces connexions invisibles qui permettent de transcender les normes de l’institution et de la hiérarchie.… Continue reading